En quête de solutions alternatives face aux bioagresseurs

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    La pression monte sur le plan sanitaire dans les vergers de fruit à noyau comme de fruits à pépins. La Sefra et Sudexpé travaillent plus particulièrement sur le pêcher et l’abricotier. Elles ont présenté leurs résultats le 22 septembre dernier.

    Drosophila suzukii, forficules, punaises diaboliques pour les ravageurs, cloque du pêcher, moniliose sur fruits pour les maladies, affichent dans le contexte bioclimatique actuel des dynamiques extrêmement préoccupantes alors même que les solutions chimiques déployées au cours des dernières décennies sont soit exclues de par leur toxicité, soit dépassées par les événements. L’évolution de la problématique du forficule (connu sous le nom vernaculaire de « perce-oreille ») est à cet égard exemplaire : cet insecte était naguère présent sur pêcher en début de saison et s’installait assez discrètement dans les noyaux de fruits précoces à noyau fendu. Désormais, il est présent durant toute la saison et peut engendrer des dégâts sur fruits plus importants qu’un mauvais coup de grêle. Les piégeages en masse pratiqués par la Sefra ont pu capter jusqu’à 180 000 insectes en l’espace d’une saison. Alors que les appâts empoisonnés au Chlorpyriphos sont interdits en France, seule la glue complétée par un piégeage massif semble envisageable pour lutter contre un insecte qui est par ailleurs un auxiliaire dans la lutte contre les pucerons en début de saison…

    La mouche Drosophila suzukii est en revanche un envahisseur récent qui n’en finit pas de modifier les pratiques des arboriculteurs tant sa multiplication est puissante et ses dégâts redoutables. En l’absence d’insecticides, seules les barrières physiques peuvent limiter les ravages de l’envahisseur. Soit des filets insect proof dont le coût peut atteindre 50 000 €/ha pour le cerisier ou une protection rapprochée directement sur le fruit à base d’argile. L’adjonction d’adjuvant peut en conforter l’action avec alors un niveau d’efficacité de 70 à 80 %. Mais l’argile laisse des traces sur le fruit et altère son attractivité visuelle… Un trempage des fruits dans de l’eau avec de l’acide citrique (bio et alimentaire) semble résoudre assez valablement le problème, sans conséquence notable : le consommateur tolèrera-t-il les quelques traces restantes ?

    © DR

    Et naturellement toutes ces opérations ne sont pas gratuites ! La punaise diabolique est aussi une nouvelle venue dans notre environnement. Elle est attirée par les fruits à maturité, pêches, poires, pommes… se multiplie à grande vitesse et peut dans certains cas affecter 100 % des fruits à quelques jours de la récolte. La solution insecticide classique peut être efficace… mais elle détruit tout l’équilibre d’un verger conduit de manière écoresponsable. Restent donc les filets et peut-être le piégeage massif. A moins qu’il suffise de traiter seulement les abords du verger au bon moment ? Ce qui signifie un dispositif de veille de la dynamique des populations. Une autre voie serait le lâcher de parasitoïdes, à condition de trouver ceux qui sont capables de s’adapter au milieu et d’y réaliser un travail puissant, car la rapidité de prolifération de cette punaise est tout simplement… diabolique ! Le chemin risque d’être long pour y parvenir. Enfin, la question des monilioses sur fruits a été abordée, la réflexion restant très axée sur le remplacement des molécules chimiques par des formulations de biocontrôle, carbonate de calcium, levures du genre Saccharomyces, avec des résultats potentiellement satisfaisants jusqu’à la récolte, qui n’empêchent pas des explosions de la maladie 48 heures après. Il semble que sur ce dossier la prophylaxie ait un rôle majeur à jouer et de nombreux travaux ont déjà été réalisés : leurs résultats sont-ils vraiment diffusés et appliqués ? Par ailleurs, les orientations génétiques poursuivies depuis des décennies ont privilégié d’autres priorités que la résilience à cette maladie. C’est quand même dommage de produire un fruit magnifique pour qu’il soit détruit par un champignon dans les jours qui suivent la récolte ! La réflexion face à la problématique des bioagresseurs devra être plus que jamais systémique.