La question, qui occupe le paysage médiatique et sociétal, a été débattue sous le prisme de la science et de la santé.
Peut-on sortir de la complexité et de la fuite en avant générée par des besoins de plus en plus fragmentés dans la société ? Indépendamment de la contrainte de prix, « le sujet majeur est l’individualisation et l’externalisation de la tâche des repas », a résumé Philippe Goetzmann, consultant et expert grande consommation, lors d’un débat entre professionnels et experts de la consommation, le 11 juillet dernier.
En clair, « nous confions le soin de laisser à d’autres cuisiner pour nous et cela génère des contraintes extrêmement élevées à nos filières alors que le consentement à payer plus cher n’est pas là ». Les écarts entre aspirations profondes et actes d’achat s’accroissent et s’additionnent. Exemple avec la tomate bio : « Les consommateurs nous ont poussé à allier le bio avec la saisonnalité. Nous avons travaillé à adapter nos gammes, comme par exemple supprimer les tomates bio en hiver. Mais nous avons connu un revers assez fort avec ces mêmes consommateurs qui ont exprimé leur mécontentement et réclamé de la tomate en hiver ! Le bio ne correspond plus exactement aux attentes des consommateurs, devenues multiples », a illustré Lise Pinhas, directrice RSE produits de grande consommation chez Carrefour.
Le consommateur s’exprime beaucoup mais elle appelle à revenir à des fondamentaux pour sortir des impasses : plutôt travailler à l’accessibilité des produits et porter des messages simples de pédagogie en collectif, dans une globalité, entre acteurs d’une même chaîne industrielle. Autre levier fondamental à réactiver : la compétence et le discours scientifique.
Rééduquer à l’alimentation
« Là est un arbitrage entre les désirs et les contraintes comme le prix ou l’accessibilité. Mais le sujet majeur, pour moi, est la compétence du consommateur. Nous sommes devenus largement incompétents pour nous alimenter correctement. Trouvons les moyens de la développer pour que les consommateurs fassent des choix vraiment éclairés et appuyons-nous sur les connaissances scientifiques », aexhorté Philippe Goetzmann. « Pire que l’ignorance, il y a l’illusion de la connaissance ! », a ironisé Pascal Perri, économiste qui porte le groupe de recherche sur la santé et l’environnement « Oui à l’innovation ! ».
Difficile pour des médecins, par exemple, de contredire désormais certaines idées reçues. « Or la science de l’alimentation affirme qu’aucun n’aliment n’est mauvais. Les régimes alimentaires sont plutôt à observer en fonction de son âge et de son état », a souligné Marie-Laure Empinet, présidente de l’Usipa (Union des syndicats des industries des produits amylacés et de leurs dérivés). Et de regretter certains concepts qui brouillent les imaginaires, en l’absence de définition partagée, comme le « fait maison ». Il est donc urgent de « rééduquer à l’alimentation dès l’enfance » et de « favoriser la transparence dans le secteur industriel ».