Campagne pomme : situation atypique

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    L’Association nationale pomme poire a tenu son assemblée générale en webinaire le 1er décembre dernier dans un contexte très particulier.

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    « La situation de la récolte 2020 est vraiment particulière », analyse Josselin Saint-Raymond, directeur de l’ANPP. « Nous sommes en année d’alternance, or une conjonction de phénomènes météorologiques observés en 2019 et 2020 a fortement influencé les conditions de cette récolte très réduite en volume (1,36 million de tonnes), mais de très haut niveau gustatif associé à de très bons ratios de pack out en station. » La variété Golden est particulièrement affectée, avec des régions de production, comme le Limousin, très pénalisées. La valorisation enregistrée sur le marché cet automne ne compense pas le déficit de volume, notamment pour les producteurs les plus touchés, ce qui fragilise la situation de l’amont. Ce début de campagne intervient après une saison 2019/2020 boostée à partir de mars par les circonstances du premier confinement, qui avait induit une forte accélération de la demande de pomme. « Le deuxième confinement ne suscite pas une hausse de consommation aussi marquée, même si elle reste sensible, alors que la demande de préemballé ne se dément pas », observe Josselin Saint-Raymond.

    En revanche, les exportations restent à un niveau modéré et affectent notamment Gala, dont l’offre semble désormais dépasser la demande à l’échelle européenne. Le Brexit et le boycott de la France par certains pays ajoutent à l’incertitude, alors que la pomiculture française a besoin d’exporter 500 000 tonnes par an pour trouver son équilibre. Il va donc y avoir un problème Gala, du moins pour le produit que l’on pourrait qualifier de « commodité agricole » sur lequel l’origine France peine à être compétitive à l’international face aux nouvelles concurrences des pays à l’Est de l’Europe ou la Turquie. Notons également que les arboriculteurs français s’orientent de plus en plus vers des variétés dotées de résistances génétiques aux bioagresseurs et sur des stratégies de production agroécologique quand la pomiculture mondiale reste encore loin de ces orientations.

    Autre objet de préoccupation, l’offre de pommes biologiques a progressé plus vite que le marché au cours des dernières années. L’ANPP a donc décidé de créer une commission dédiée, chargée notamment de collecter des données précises et fiables sur l’évolution des surfaces et de la production afin de suivre ce marché avec plus de finesse. Dans le même temps, l’ANPP pousse sa démarche Vergers écoresponsables, dont le niveau de notoriété patiemment développé par dix années d’investissement constant auprès des consommateurs incite à creuser encore le sillon. D’où l’objectif de passer à 50 % des volumes en certification Haute valeur environnementale d’ici 2024 et 100 % d’ici 2029 pour démontrer le niveau agroécologique de la démarche. En parallèle, l’ANPP s’engage dans un programme de production bas carbone conjointement avec l’association Pink Lady® Europe, Blue Whale et l’Afidem. Mais cette dynamique n’est pas du goût du milieu de l’AB très remonté contre le développement de la certification HVE, et cet état d’esprit clivant est regrettable. « HVE peut valoriser toutes les bonnes pratiques agricoles, sans opposition entre modèles agricoles. L’élevage s’y intéresse de plus en plus et pourrait aller très vite dans cette direction », insiste Josselin Saint-Raymond. « C’est un levier stratégique pour faciliter la transition agroécologique de la ferme France en parallèle de la bio ».

    La question phytosanitaire devient un enjeu majeur, vital même, tant la pression sur les solutions disponibles jusqu’ici est forte et précipitée. Nous y revenons plus précisément dans un article dédié. Enfin, les dirigeants de l’ANPP prennent acte des nouvelles habitudes de communication induites par les confinements vécus en 2020. Et si la rencontre vivante reste incontournable (et a tellement fait défaut en 2020), la gouvernance de l’association peut gagner en agilité et en efficacité avec le recours aux réunions en téléconférence. Cela, c’est déjà « le monde d’après » !