Hommage au pionnier du maraîchage sous serre verre

    0
    2895

    Henri Marchal, le grand serriste promoteur de la serre verre en France, très engagé dans l’action professionnelle collective, président du CTIFL, est décédé le 13 septembre à l’âge de 86 ans.

    Henri Marchal a durablement marqué le monde du maraîchage français. Nous l’avions rencontré en 2006 pour remémorer pour nos lecteurs son parcours de serriste, à Saint-Mihiel dans la Meuse et dans le Sud-Est, à Saint-Martin-de-Crau et à Pierrelatte. Saint-Mihiel doit son activité historique de maraîchage aux troupes françaises qui y étaient établies avant 1914. Henri Marchal y est né dans une famille de maraîchers. C’est en Allemagne, dès 1953, qu’il découvre les premières serres verre chauffées : il engage alors famille et voisins à les visiter, qui prolongent leur investigation aux Pays-Bas où ils rencontrent les constructeurs de serres du Westland…

    Les constructions de serre débutent très rapidement à Saint-Mihiel, où elles connaîtront un puissant développement. Dès lors, Henri Marchal sera un infatigable voyageur de par le monde, toujours en quête d’innovations technologiques pour la serre, mais aussi un grand constructeur, un grand entrepreneur, un leader aussi, qui entraînera beaucoup d’autres professionnels dans son sillage. Au début, les serres ne sont pas chauffées et accueillent des cultures de légumes feuilles. Puis, progressivement, tomates et concombres vont prendre le pas sur les laitues, notamment suite au choc pétrolier de 1973 qui pousse à valoriser l’ensemble du volume de la serre. Dès 1970, il fonde et préside la commission serre qui deviendra un des fers de lance de la FNPL et qui obtient en 1971 la mise en place de l’aide aux serres par le Forma, avec le concours de Jacques Chirac, alors ministre de l’Agriculture.

    Avec la FNPL également, Henri Marchal contribuera à mettre en place en 1978 le cycle annuel de formation de serriste à Théza (Pyrénées Orientales), qui formera en vingt ans quelque 600 entrepreneurs français. Elu président de l’INVUFLEC en 1977, il contribue à la fusion-absorption avec le CTIFL, qu’il présidera de 1983 à 1995. Il y œuvre notamment au déploiement de serres expérimentales sur les sites de Balendran et de Carquefou. 1978 voit le basculement vers les cultures hors sol et les techniques de production ne cessent de se sophistiquer : la serre exige des connaissances et des capacités de pilotage toujours plus fines. Expérimentation et formation des hommes sont désormais indispensables pour mener à la réussite des investissements toujours plus lourds.

    Les années 80 voient émerger la lutte intégrée, avec le début du recours aux prédateurs permettant de réduire, voire de supprimer la lutte chimique. La pollinisation par les bourdons se généralise également à la même époque. En 1998, alors qu’il transmet son affaire à ses trois enfants, Patrick, Sandrine et Lionel, Henri Marchal installe la cogénération à Saint-Martin-de-Crau en regrettant de ne pouvoir la faire tourner 12 mois sur 12 comme en Hollande. Et ce n’est pas faute d’avoir plaidé le dossier auprès d’EDF et des pouvoirs publics dans le cadre de la FNPL ! Henri Marchal s’est en effet longuement impliqué dans les négociations collectives sur tous les dossiers relatifs au chauffage des serres. Très engagé pour le collectif professionnel, Henri Marchal fait aussi partie de ces hommes qui ont su se rapprocher malgré leurs différences et leur situation concurrentielle pour initier au début des années 90 le groupe Rougeline, né en Provence et désormais déployé sur toute la moitié Sud de l’hexagone. En 1999, il avait également œuvré à la première réunion de la commission mixte franco-espagnole, visant à sortir des blocages récurrents de camions espagnols sur le territoire français. Pendant un demi-siècle, Henri Marchal a été à la fois un inlassable entrepreneur doublé d’un responsable professionnel à l’entregent puissant, investi sur de très nombreux fronts, un grand de France !

    © DR