La filière noix cherche de nouvelles voies

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    Le dernier symposium mondial consacré aux filières noix et noix de pécan a été un moment unique de resynchronisation sur les dernières avancées les plus récentes, pour répondre aux problématiques et contraintes rencontrées par les nuciculteurs.

    noix fraîche
    © DR

    L’événement rythme tous les quatre ans la vie des professionnels des filières noix et noix de pécan au niveau mondial, mais est rare en France (précédentes éditions au Chili en 2017, Chine en 2013, Australie en 2009). C’est donc une fierté pour la filière hexagonale, sous l’égide de l’ISHS*, d’avoir su accueillir en plein fief de la Noix de Grenoble AOP quelque trois cents participants de vingt-six nationalités différentes à l’occasion de ce neuvième symposium international, au cours de cinq jours denses du 12 au 16 juin dernier.

    Les résultats les plus en pointe

    Équipes de recherche, d’expérimentation et d’innovation du monde entier ont ainsi pu présenter leurs travaux et leurs résultats les plus récents qui touchent les nuciculteurs : matériel végétal avec de nouvelles variétés et porte-greffes en lice, nouvelles pratiques culturales en fonction des contraintes actuelles (manque d’eau, réchauffement climatique, fatigue des sols…), nouveaux moyens de lutte contre les ravageurs, notamment pour la France dans un contexte de suppression de matières actives…

    Autres avancées technologiques : l’utilisation des bactériophages pour lutter contre la bactériose ou la technique de la TIS (technique des insectes stériles), encore en expérimentation, pour lutter contre le carpocapse du noyer. Les agroéquipementiers ont présenté leurs matériels et innovations technologiques dans un espace dédié. Parmi les avancées, on peut citer l’optimisation de la mécanisation pour réduire les coûts de récolte (Monchiero) et une nouvelle solution de triage et calibrage électronique spécialement conçue pour la noix (Unitech).

    Quatre grands sujets apportant des solutions aux nuciculteurs

    Dans cette diversité et richesse des présentations et démonstrations, quatre grands sujets ont retenu l’attention de végétable, parce qu’ils apportent des solutions pour surmonter les problématiques et contraintes qui touchent les nuciculteurs.

    La première, c’est le renouvellement variétal. Les variétés historiques qui ont fait le succès de la filière (Franquette, Fernor, Lara…), vont-elles être détrônées par une nouvelle génétique productive, tolérante à la sécheresse ou à certaines maladies comme l’anthracnose ? Sur ce sujet, on peut citer deux variétés testées à ce jour au Portugal par l’équipe Vez (obtenteur)/IPS (éditeur), Barona et Barquesa, en demande d’inscription au niveau européen.

    En France, citons les trois nouvelles variétés testées à la station de Creysse dans le Périgord, en cours d’inscription, prévues d’ici à 2025 : Germaine (Franquette x Chandler), la productive Charlette (Fernor x Chandler) et Dorianne (Fernor x Shinrel).

    Vers des pratiques agroécologiques

    Le second sujet concerne le renouveau agronomique vers des pratiques plus agroécologiques. En France, citons les travaux menés à la station de la Senura au travers du programme SysNoix, dont l’objectif est d’identifier les systèmes de conduite permettant de réduire de 50 à 100% les IFT (indicateurs de fréquence de traitements phytosanitaires).

    La diversification est également une thématique qui trouve un écho palpable aujourd’hui dans divers endroits du monde. Citons la réintroduction de la noix de pécan associée à la culture de la truffe dans la région des Pouilles en Italie, façon « paysage emboîté » dans une logique territoriale, pour relancer autant les revenus des producteurs que l’attractivité du secteur et permettre la création de filières nouvelles (comme la valorisation du bois des pacaniers pour chauffer les habitations).

    En France, citons le très récent projet pilote d’adaptation de l’arboriculture au changement climatique par la culture du pacanier (noyer de pécan) en agroforesterie, porté par l’Association française d’agroforesterie en lien avec de multiples partenaires. « Il ne s’agit pas juste de planter des arbres dans des champs, mais de les associer à d’autres cultures comme les céréales afin de bénéficier d’avantages comme la protection des sols, augmenter la disponibilité de l’eau, nourrir les animaux… Notre défi est de déterminer si l’agroforesterie des pacaniers peut contribuer directement aux enjeux climatiques, alors que les fermes cherchent plus de résilience et que certains réfléchissent à se diversifier », souligne Mathieu Duflos, chargé de projet de l’Association française d’agroforesterie.

    Constituer une interprofession

    La France, qui bénéficiait jusque-là de très bonnes conjonctures sur le marché mondial, accuse une crise sans précédent sur fond de compétitivité dégradée. La filière veut se ressaisir, à commencer par se (re)structurer derrière une organisation à portée nationale et non plus seulement par bassin de production, relancer la consommation d’un produit pourtant plébiscité pour ses vertus (Nutri-Score A), développer la transformation vers le cerneau pour mieux répondre aux nouveaux besoins de nomadisme et grignotage, mutualiser les efforts sur les marchés à l’export.

    « Notre défi est d’arriver à constituer une interprofession réunissant l’ensemble de la filière et faire fonctionner une AOP Noix nationale. Rien que sur le marché français, notre marge de progression est énorme. L’enjeu est de redresser la consommation, de s’intéresser aux changements » précise Christian Mathieu, producteur en Isère et président de la Senura, moteur de cette relance, s’exprimant de concert aux côtés de Stéphane Masset (vice-président) et de Fabien Joffre, président de Coop Cerno et de l’Internoix du Sud-Ouest. Il y a urgence en effet : 30 % des consommateurs ne consomment jamais de noix, quand la majorité des consommateurs qui en consomment (40 %) n’y pensent que « quelques fois par an » et globalement en petites quantités, apprend-on de la dernière étude consommateurs 2023 portée par Catherine Baros au CTIFL.

    Un rapport de mission d’état des lieux de la filière et de recommandations pour sa structuration devrait être remis par les services du ministère d’ici la fin de l’été. Et ces problématiques seront plus détaillées dans un article sur les fruits d’automne à paraître dans notre prochaine édition de septembre.

    * Le symposium est piloté par l’International Society for Horticultural Science et a été coordonné localement par la station nucicole Rhône-Alpes en Isère (Senura) et par le CTIFL.

    symposium de la noix
    © végétable

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