La filière banane tire la sonnette d’alarme

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    L’interprofession de la banane attire l’attention des pouvoirs publics sur les impacts de l’inflation. Et elle insiste surtout sur la menace de pertes importantes en cas de coupures d’électricité prolongées dans les mûrisseries.

    Alors que l’amont de la filière subit depuis fin 2021 une première tranche de hausse de ses coûts de production, fertilisants et emballages notamment, l’aval de la filière est maintenant aussi touché par la crise énergétique. Dès le début de l’année 2022, les taux de fret maritime ont fortement augmenté. « De 20 à 30 % selon les origines », précise Philippe Pons, président de l’AIB. « Puis à partir du mois de mars, c’est la double peine avec l’augmentation des prix du carburant, qui viennent se cumuler au cout du fret via la BAF* ». Car le transport maritime et le débarquement des containers représentent un tiers du prix d’une banane verte à son arrivée dans les ports européens. Et l’inflation sur les carburants a évidemment impacté aussi le transport terrestre, des ports vers les mûrisseries, puis les plateformes de distribution ou les marchés de gros.

    L’étape de mûrissage de la banane n’est pas considérée comme très énergivore. L’AIB a calculé que la consommation électrique se situe autour de 0,07 kW par kg de banane, soit environ 0,8 kW pour la consommation annuelle de banane d’un Français (11 kg). Néanmoins, la situation est très tendue pour de nombreux mûrisseurs confrontés à la fin de leur contrat d’énergie au 31 décembre 2022, comme dans d’autres filières. « Les fournisseurs d’électricité proposent des contrats 2 à 3 fois plus élevés que l’ancien tarif. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ! Sur nos métiers à faible marge (moins de 3 %), le poste énergie représente 26 à 30 % de la marge nette maximale dégagée par les entreprises du secteur. Une telle augmentation des coûts de l’électricité met en péril des entreprises. » Le président de l’AIB rappelle aussi que l’enjeu pour la filière est de trouver un équilibre entre la survie des entreprises et des prix acceptables pour tous les consommateurs. « Pour l’instant, toutes ces hausses n’ont pas été répercutées sur le prix de vente au consommateur, puisque les prix de transfert avaient été contractualisés en novembre 2021 pour un an. » Les négociations avec les distributeurs sont en cours jusqu’à fin novembre pour les prochains contrats, qui devront tenir compte de ces augmentations de charge pour assurer la pérennité de la filière.

    Mais ce qui inquiète avant tout les professionnels est l’annonce de potentielles coupures sur le réseau. Les mûrisseurs estiment pouvoir tenir au maximum deux heures sans ventilation dans les chambres. Au-delà, le phénomène de maturation et de chauffage naturel s’emballe et il y aura des pertes importantes de produits. L’AIB insiste sur la nécessité de garantir un accès continu à l’énergie, afin d’éviter un énorme gaspillage. Pour cela, chaque mûrisserie doit se signaler auprès de sa préfecture de tutelle, qui est l’administration habilitée à arbitrer les délestages au niveau local en cas de pénurie.

    * Bunker adjustement factor.

    © Régis Domergue – Cirad