Éloge de l’éducation alimentaire en région Aura

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    Vaste question posée que celle d’arriver à « concilier les attentes citoyennes et les enjeux de la filière des fruits et légumes frais ». Mais c’est bien sur ces enjeux de société que se retrouvent l’ensemble des acteurs de notre filière. Réunis au sein du comité régional interprofessionnel en Auvergne-Rhône-Alpes, ils se sont donné rendez-vous le 13 mai dernier à l’Hôtel de Région à Lyon pour débattre des meilleures voies pour y arriver.

    La rencontre à l’hôtel de Région portait une dimension hautement politique, professionnels et élus régionaux travaillant de concert depuis de nombreuses années. Proximité qui se matérialise par un accompagnement renouvelé de la Région au travers de ses Plans de filière (notamment 3 M€ par an pour la filière fruits). L’interprofession étant riche de quinze familles professionnelles, l’événement a rassemblé pas moins de 170 participants sur toute la chaîne de valeur.

    « Nous essayons d’être un apporteur de solutions à des problématiques que les filières et les collectivités peuvent avoir. Tout cela n’est possible que si l’on a des femmes et des hommes très engagés dans notre filière », a introduit Régis Aubenas, président de ce comité. Chacun aura pu apprécier la vitalité, la diversité des métiers et des vocations au cours d’une première table ronde, également la contribution des producteurs et de l’écosystème technique en matière d’agroécologie dans une seconde. « Les fruits et légumes frais, c’est jamais trop », tel le rappelle le message principal de la campagne de communication actuelle de l’interprofession au national, mais des producteurs dans la salle n’ont pas manqué de poser la question du prix, ou plutôt de la valeur que les consommateurs voudront bien accorder à tous ces efforts et services rendus par la profession, engagés depuis de nombreuses années et qui demandent des investissements croissants. « Pour avoir cette reconnaissance du consommateur, nous aurons toujours à cœur d’accueillir des écoles, des groupes, des jeunes, pour pouvoir les sensibiliser à nos pratiques en toute transparence », souligne Frédéric Riche, producteur de légumes et président des Maraîchers du Rhône. « Nous sommes une filière de mieux en mieux organisée et qui communique, avec un réseau d’échanges qui permet de nous réunir. Notre vocation est d’apporter de la valeur au produit par le stockage, le conditionnement, en travaillant étroitement avec l’amont qui a toujours de plus en plus de contraintes et est confronté au problème de l’emploi », ajoute Laurent Dejérôme, expéditeur et président de l’Union des sociétés d’expédition en F&L en région Aura. « La particularité de cette journée est de “déparisianner” le débat, de montrer que le dynamisme est d’avoir des projets ensemble, de remonter les attentes pour être plus efficaces. Pour nous le cadre c’est la région, le local c’est la région », n’a pas manqué de relever Christian Berthe, président du marché de gros Lyon-Corbas. Et de pointer quelques résultats : « Nous sommes passés de 1 500 à 2 400 clients depuis le déménagement en 2009, 240 000 t à 305 000 t par an, 3 000 t de déchets en moins. Nous sommes un outil de valorisation important et nous avons des produits d’excellence. Nous avons aussi un devoir de communiquer sur ce que l’on fait, au plus grand nombre. »

    Frédéric Riche (président des Maraîchers du Rhône), Philippe Muscat (directeur du restaurant inter-administratif de Lyon), Jean-Luc Botti (Meilleur ouvrier de France primeur), Laurent Dejérôme (président de l’Union des sociétés d’expédition en fruits et légumes en Auvergne-Rhône-Alpes) © végétable

    Quant aux bienfaits de la consommation des fruits et légumes, ils ne sont plus à démontrer et la science est là pour en apporter la preuve tous les jours, l’a rappelé en quelques données clés Delphine Tailliez-Lefebvre, directrice adjointe d’Aprifel. Mais comment résoudre cette équation où les professionnels butent sans cesse entre « les F&L sont la solution face à certains fléaux de santé publique comme les maladies cardio-vasculaire » et « deux tiers des moins de 35 ans sont de trop faibles consommateurs de F&L » ? Éléments de réponses possibles dévoilés par Jérémie Lafraire de l’Institut Paul Bocuse, chercheur en sciences cognitives, présentant toutes les barrières naturelles dont est câblée l’espèce humaine dès la naissance, héritage des temps anciens. « Ce qu’il faut pour surmonter ces freins, ce sont des connaissances, et donc une éduction alimentaire dès le plus jeune âge », recommande-t-il. Un message dont la profession semble prendre de plus en plus conscience. La nutritionniste experte en santé publique à l’Inrae Marie-Joseph Amiot-Carlin appelle de ses vœux à plus de répétition dans les repas préparés par les parents français vers leurs enfants, car c’est cela qui fait l’ancrage et permet d’accroître les bonnes pratiques alimentaires tout au long de la vie. « C’est un point important », selon elle, qui mène des études hors de nos frontières, en Afrique par exemple, où l’on peut voir des différences significatives. « L’”implementation science” est un vrai enjeu pour le futur, pouvoir trouver des solutions mais avec l’ensemble des acteurs », abonde Jérémie Lafraire. Une façon également de repenser l’accessibilité, plus au cœur des territoires, prenant en compte les diversités de populations, notamment défavorisées.

    Transmettre sa passion et expliquer comme elle est née, c’est peut-être ce qu’incarne le mieux Jean-Luc Botti, Meilleur ouvrier de France primeur (parmi les quatre en région Aura). L’attractivité des métiers et la volonté de tracer sa voie, c’est ce qu’incarne également Grégoire Cote, jeune installé depuis 2020 sur la commune de Loire-sur-Rhône, visité l’après-midi. Après un BTS industrie, il a décidé de se réorienter vers la production arboricole et de fraises, avec beaucoup d’envie.

    Régis Aubenas (arboriculteur et président du Comité régional interprofessionnel Auvergne Rhône-Alpes) et Christian Berthe (président du marché de gros Lyon-Corbas) © végétable