Comment adapter la production de fruits et légumes au changement climatique 

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    La première journée thématique d’Idfel a permis de rappeler les enjeux du changement climatique pour la filière fruits et légumes du bassin Val de Loire, mais a aussi suggéré des perspectives positives, sous réserve d’avancer collectivement et sans attendre.

    Amphitjéâtre de la journée idfel
    Idfel Val de Loire a organisé sa première journée thématique à Angers. © végétable

    Idfel Val de Loire (association des organisations de producteurs et producteurs de fruits et légumes des régions Centre-Val de Loire et Pays de la Loire) organisait le 28 juin dans les locaux de l’Istom, à Angers, sa première édition de « l’Agitée ». Cette journée thématique interrogeait ces invités sur la question « comment produire plus de fruits et légumes dans le Val de Loire avec moins de pesticides et d’eau, dans le contexte du changement climatique ?».

    Une centaine d’acteurs régionaux (représentants du secteur de l’arboriculture et du maraîchage, responsables institutionnels, chercheurs et enseignants) ont participé activement à des échanges avec les nombreux intervenants.

    Le réchauffement climatique n’est pas uniforme

    En guise d’introduction, Jean-Louis Bertrand, vice-président du Giec Pays de la Loire (Groupe interdisciplinaire d’experts sur le changement climatique), a présenté une projection du climat en 2085. Projection à l’échelle régionale, car « le réchauffement climatique n’est pas uniforme, d’où l’importance de territorialiser et d’apporter des réponses locales sur la gestion de la ressource en eau, car la situation en Sud-Vendée ne correspond pas à la moyenne de la région Pays de Loire, par exemple », a précisé Jean-Louis Bertrand.  En matière de précipitations, le cumul annuel moyen devrait peu évoluer, mais le régime de précipitations va devenir beaucoup plus irrégulier. « Pour cette raison, la région Pays-de-Loire sera particulièrement vulnérable aux inondations, aggravées par une artificialisation des sols supérieure à la moyenne nationale. D’où la nécessité de renaturer l’environnement via des politiques adaptées d’aménagement du territoire. Et d’où l’intérêt aussi de retenir l’eau quand elle tombe. »

    « Il faut apprendre à gérer l’eau et remettre des arbres partout, en ville comme à la campagne, pour conserver l’humidité des sols. »

    Bruno Parmentier, auteur et conférencier, a martelé le même message. « Il faut apprendre à gérer l’eau et remettre des arbres partout, en ville comme à la campagne, pour conserver l’humidité des sols. » Parmi les solutions qu’il a énumérées, l’aquaponie, qui fonctionne comme une serre de légumes, associée à de la pisciculture et des panneaux photovoltaïques. Mais aussi la réutilisation des eaux usées des villes et le c de l’eau de mer qui deviennent une réalité.

    Face à l’ampleur des enjeux et à l’urgence et parfois la violence du changement climatique, la nécessité de jouer collectif a fait consensus dans la salle. Au niveau régional, le Giec préconise d’accompagner les acteurs, par exemple en formant tous les élus et dirigeants, et souhaite mettre en place une conférence réunissant les acteurs de la filière agricole Pays de Loire pour avancer de manière rapide et coordonnée.

    En parallèle, l’Ademe accompagne les filières dans leurs démarches d’adaptation pour aller vers la neutralité carbone en 2050. « Pour atteindre ces objectifs il est indispensable d’adapter l’agriculture et, en priorité, de faire émerger et soutenir les dynamiques collectives, tout en adoptant une posture agile pour faire face à l’évolution de la situation », a délaré Philippe Moinat, ingénieur agriculture urbaine et bioéconomie à l’Ademe Centre-Val de Loire. Dans cette optique, la filière pommes en centre Val de Loire a participé au projet Adaptagro.

    Ainsi, elle a pu définir les actions prioritaires à mener, parmi lesquelles la diversification des productions et des débouchés (dont l’agroforesterie), l’anticipation des aléas climatiques grâce l’innovation et au déploiement des OAD (outils d’aide à la décision) et la recherche agronomique. «Toutefois la sélection variétale se fait sur du temps long et la génétique ne peut pas suffire pour répondre rapidement à l’adaptation », a rappelé François Laurens, chercheur Inrae et animateur national du GIS-Fruits.

    La façade ouest de l’Europe plus propice à la production

    « Néanmoins, il y a de bonnes raisons de rester optimistes dans le Val de Loire. Il faut continuer à nourrir la planète, en tenant compte des probables mouvements de population au niveau mondial. Et vu l’évolution du climat au sud de l’Europe, la façade ouest sera plus propice à la production. D’un point de vue alimentaire, la tendance à la réduction de consommation de viande jouera en faveur des fruits et légumes, qui auront un rôle essentiel dans la nutrition », a pointé Jean-Louis Bertrand.

    « Plus on est proche de l’océan, moins on se réchauffe », a ajouté Jean-François Berthoumieu, directeur de l’ACMG, qui lui aussi recommande de « garder l’eau dans les champs, remembrer et replanter des haies qui pourraient être irriguées l’été ».

    Le terroir et les conditions pédoclimatiques du Val de Loire semblent permettre de nombreuses adaptations en production, grâce à la présence localement d’un écosystème technique et scientifique riche, propice au décloisonnement des connaissances et l’émergence de nouvelles technologies.

    « Cette journée visait à accélérer la prise de conscience, auprès de tous les acteurs du territoire, du besoin de passer de postures défensives à des collaborations engagées et structurantes, dépassionnées et orientées vers des résultats multicritères. Car produire plus, de manière durable, avec moins d’intrants, ne sera possible qu’en mobilisant collectivement plus de matière grise », ont souligné les organisateurs de cette première journée thématique, qui sera très certainement le début d’une série.

    journée Idfel Val de Loire
    La première journée thématique d’IdFel a permis de rappeler les enjeux du changement climatique. © végétable