Plaidoyer pour une éducation alimentaire pour tous

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    Olivier Dauvers et Florence Dupraz ont rappelé lors des « Mardis de Medfel », le 24 mai dernier, pourquoi « apprendre à s’alimenter est aussi important que d’apprendre à lire et écrire » : retour sur la genèse d’un manifeste mis sur le devant de la scène lors du dernier Salon de l’agriculture. Toutefois, le déploiement d’un programme concret à l’école n’est pas pour demain.

    C’est un sujet montant, avec la volonté de personnalités et d’organisations issues du monde de l’agri-agroalimentaire de placer l’apprentissage de l’alimentation au même niveau que celui du savoir lire, écrire et compter. Olivier Dauvers, journaliste et fondateur du Think Tank agroalimentaire – Les Échos, accompagné de Florence Dupraz, directrice de l’Open agrifood (think tank et do tank qui rassemble tous les acteurs agri-agro de la semence au consommateur pour « casser les silos qu’il peut y avoir dans les filières ») ont ainsi développé le 24 mai dernier, lors des « Mardis de Medfel », les raisons qui les ont conduits à produire le manifeste « Pour une éducation à l’alimentation partout, pour tous ». L’Acofal, le CNIPT, Euro-Toques, présidé par le chef Guillaume Gomez, et « Les enfants cuisinent » sont également parties prenantes de sa rédaction. Ayant déjà rassemblé plus de 1 000 signataires, la raison d’être de ce manifeste a été exposée au dernier Salon international de l’agriculture, en mars dernier, en présence de nombreux invités d’honneur et de personnalités publiques. « C’est juste du bon sens », assène Olivier Dauvers. « Nous revendiquons de pouvoir un jour inscrire l’éducation à l’alimentation dans les programmes scolaires de l’Éducation nationale », au même titre que l’apprentissage universel de lire, écrire, compter. Trois raisons principales sont évoquées : besoin urgent de « retisser le lien entre la société et son agriculture », pallier la disparition de la transmission intra-familiale du savoir-faire culinaire, et « constater – de manière très documentée – qu’il y a un lien objectif, avéré entre l’alimentation et la santé ». « La mauvaise alimentation a un coût pour la santé publique. C’est un investissement qui va se payer sur plusieurs générations », prédit Olivier Dauvers. Florence Dupraz appuie ces constats d’anecdotes : « Pendant le premier confinement en temps de Covid, les jeunes avaient faim. Eux qui avaient l’habitude d’aller au fast food ou au kebab ne savaient pas s’alimenter par eux-mêmes. Les queues devant les Crous pendant les confinements étaient visibles. »

    Concrètement, Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’Éducation nationale en mars dernier, avait accepté de solliciter le Conseil supérieur des programmes. Mais l’action reste pour l’instant primitive, le programme expérientiel imaginé par ses concepteurs et orienté davantage sur les petites classes étant en compétition avec d’autres sujets jugés également prioritaires (mathématiques, éducation sexuelle…). Et il se heurte à l’inertie administrative.  « Une étude menée montre que les parents sont convaincus à 80 % et sont même prêts à payer. Les enseignants nous suivent. L’Éducation nationale n’y est pas hostile, mais il faut prendre le temps, y travailler », commente Olivier Dauvers. Si le programme risque de ne pas être mis en place avant plusieurs années, la filière peut compter sur « un soutien politique malgré tout ». « Nous essayons d’installer un rapport de force, en ayant les industriels avec nous, les distributeurs, les parents d’élèves, les enseignants », ajoute Florence Dupraz, espérant atteindre les 150 000 signatures pour « pouvoir cranter ».

    © Stuchin