« L’agriculture, c’est une solution »

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    Les think tanks Agridées et Pluriagri ont organisé, le 14 septembre, un colloque visant à détricoter les scénarios possibles et les solutions pour passer à l’action d’une agriculture à la fois productive et durable.

    L'écosystème vu par Terrasolis
    L’écosysytème by Terrasolis. © Terrasolis

    En préambule de cet événement, un rappel des faits que nul n’ignore : les défis s’accumulent.  Enjeux environnementaux, économiques et démographiques se superposent et obligent tous les secteurs de l’agri-agroalimentaire à se transformer profondément, dans un contexte géopolitique tendu. L’agriculture européenne a à la fois des responsabilités pour atténuer ses impacts, comme un rôle majeur à jouer, pour notamment, améliorer la sécurité alimentaire et le changement climatique.

    « De nouveaux modèles sont à construire » : telle était la question centrale débattue lors de ce forum organisé par Agridées et Pluriagri* le 14 septembre dernier, où se sont succédé en tribune des agriculteurs, des personnalités du monde scientifique, des institutions publiques et des acteurs économiques.

    Arriver à marier transition agroécologique avec compétitivité

    Sur le plan de la prospective, une batterie de projections et de scénarios sont désormais développés par la plupart des organisations professionnelles et des institutionnels, au risque de s’embrouiller dans les pistes à dégager. Mais il y a un consensus fort : le nœud de tous nos changements de modèles futurs réside dans le couple environnement-économie, ou autrement dit transition-compétitivité.

    Comment pouvons-nous engager une vraie transformation agroécologique sans percuter de plein fouet la rentabilité des entreprises agricoles, premier maillon d’une chaîne alimentaire, qui ne cessent de décliner ? La question est bien là. « Les injonctions ne peuvent être binaires, les variables interagissent, d’où l’impératif de mesurer les impacts de toute transition engagée », a résumé Philippe Dubief, rapporteur des travaux de prospective Culturibles.

    Les discussions ont porté également sur qui et comment rémunérer ces transitions, que les agriculteurs seuls ne peuvent supporter (la question des paiements pour services environnementaux rendus par les agriculteurs).

    L’approche de la bioéconomie comme solution

    Au final, par quel bout commencer ? Y a-t-il un scénario qui se dégage plus que d’autres ? Certains exemples présentés et l’approche de la bioéconomie peuvent aider les décideurs à sortir de la spirale de l’inaction, faute de chemin de transition clair. « L’approche par la bioéconomie, c’est-à-dire la valorisation des ressources du vivant, permet de faire concilier durabilité environnementale et condition de l’existence de l’économie », a longuement exposé Jean-Marc Callois, de la DRAAF Auvergne-Rhône-Alpes.

    « Le besoin de transition est systémique, il s’agit d’emmener tous les composants ensemble sinon ça ne décolle pas (exemple des légumineuses). Au final, l’approche territoriale est sûrement la façon la plus efficace de changer de façon systémique », a plaidé Jean-Marc Callois. Il a annoncé une déclinaison régionale de la planification écologique du gouvernement, encore en phase de structuration. « L’échelle régionale est un bon échelon pour comprendre les contraintes des autres et agir collectivement. »

    Il a cité plusieurs exemples d’approche territoriale qu’il estime d’intérêt, proposant une approche nouvelle des écosystèmes : Savéol, Cooperl, la filière lin en Normandie… « L’exemple parfait » étant, selon lui, le projet présenté par Maximin Charpentier. Une personnalité à multiples engagements : producteur de céréales, de pommes de terre industrie et de cultures à vocation énergétique, élu à la chambre d’agriculture régional du Grand-Est et président de Terrasolis.

    Maximin Charpentier a présenté en détail l’approche de ce projet de démonstrateur en économie circulaire complète, qui vise créer un écosystème bas carbone pour la transition de l’agriculture d’un territoire (en l’occurrence, valoriser sur un même lieu du bois, de la biomasse des haies par la méthanisation et de retourner au sol les produits générés pour atteindre la neutralité carbone).

    « L’agriculture, c’est une solution. Elle doit se réinventer mais elle a toutes les solutions en elle. On peut arriver à mettre en équation la durabilité avec une sobriété réinventée. L’avenir est pour l’agriculture, c’est une évidence », a-t-il démontré avec quelques objectifs en passe d’être réalisés (20 % de biomasse en plus, 75 % de réduction des gaz à effet de serre dans ce projet). En matière de territoire et de transition, citons également la prospective « Agriculture Bretagne 2040 » réalisée par la Chambre d’agriculture de Bretagne, présentée par la chargée de mission Maud Marguet, qui en toile de fond vise à répondre à un objectif pour l’agriculture : réduire de 35 % les émissions de GES (gaz à effet de serre) d’ici à 2040 par rapport à 2015. Parmi les cinq scénarios contrastés, le chiffrage d’un scénario global co-construit avec l’ensemble des parties prenantes est en cours.

    * Agridées est le think tank de l’entreprise agricole et se veut, depuis sa création en 1867, un lieu de questionnements, débats et d’expertises qui réunit les secteurs agricoles, agroalimentaires et agroindustriels. L’association Pluriagri rassemble des entreprises et organisations du secteur des grandes cultures.

    Tribune au colloque Agridées
    © DR