C’est une double célébration pour la filière pomme bio française : la pomme Juliet, unique en son genre, fête plus de deux décennies d’existence aux Valayans (84), au cœur de son verger historique, le 10 octobre dernier.
Derrière ce fruit à la peau rouge éclatante, légèrement nuancée de jaune, au croquant franc et au parfum délicat qu’est la pomme Juliet, se cache un collectif engagé, pionnier d’un modèle vertueux alliant performance agronomique, durabilité et d’une identité de marque. Créée en 2005, l’association Les Amis de Juliet célèbre aujourd’hui vingt ans d’engagement pour une pomme pas comme les autres. Jean-Noël Carles, producteur historique et président de l’association, ainsi que les 190 producteurs qui la composent, incarnent les valeurs de l’agriculture biologique, d’innovation et de rigueur qui ont porté Juliet jusqu’aux rayons des magasins bio, de la grande distribution et des grossistes. L’association est coordonnée et animée par Vincent Lehailler qui fait partie de l’aventure depuis bientôt vingt ans.
Mais l’histoire de Juliet commence bien avant. En 1998, Guilhem Sévérac, technicien à la Chambre d’agriculture de Vaucluse, repère la variété lors d’un échange avec Benoît Escande, pépiniériste et obtenteur. Originaire des États-Unis et ignorée du marché conventionnel, Juliet séduit Guilhem par son goût… et par son nom (qui n’est autre que le prénom de sa fille !). L’idée d’un essai en bio est alors lancée avec l’OP Midi Saveur, aux Valayans (84). Nous sommes en pleine crise de la vache folle : un projet bio prend tout son sens. Et en 2001, les premiers vergers sont alors plantés aux Valayans et à Saint-Andiol (13).
Des qualités naturelles
Juliet, c’est aujourd’hui 190 producteurs, 16 stations de conditionnement réparties en France, une production 100 % bio, 100 % française, implantée en Provence-Alpes-Côte d’Azur, dans le Sud-Ouest, la Vallée du Rhône et le Centre-Val de Loire. Sa commercialisation se répartit de façon équivalente entre les spécialistes bio, les grossistes et les enseignes de la grande distribution. La récolte, qui s’étale sur environ trois semaines en octobre, atteint cette année 24 000 tonnes, dont un tiers destiné à l’industrie (compote, jus, cidre). Juliet est de retour en rayon depuis le 15 octobre. Grâce à ses qualités naturelles – résistance à la tavelure, tolérance aux pucerons, excellente conservation –, Juliet séduit aussi bien les consommateurs que les producteurs.
« Les élus passent, la technique reste », rappelle avec justesse Sophie Vache, présidente de la Chambre d’agriculture du Vaucluse lors de l’événement anniversaire. Elle salue l’implication des producteurs pionniers et le rôle clé joué par Guilhem Sévérac dans la construction de cette réussite collective. Georgia Lambertin, présidente de la Chambre d’agriculture de la région PACA, ajoute : « Dans un contexte agricole parfois difficile, je salue cette organisation de producteurs, la réussite agronomique et commerciale de Juliet née en région Paca. » Malgré cette success story, le contexte reste tendu pour la bio. Jean-Noël Carles souligne les freins actuels que sont « le pouvoir d’achat, la hausse des coûts de production, l’augmentation rapide des surfaces bio poussée par les pouvoirs publics, la multiplication des signes de qualité, notamment dans la restauration »…
Un attachement à la bio
Autant de défis que la filière doit relever collectivement. Alors que le secteur de l’alimentation bio tente de se remettre de « sa » crise, le président de l’association renouvelle son attachement à la bio. Malgré un palier atteint dans les plantations, il espère que de nouveaux arboriculteurs rejoindront Les Amis de Juliet. Car cette pomme peut s’appuyer sur un socle solide : des producteurs motivés, une organisation rodée et une reconnaissance du marché acquise au fil des ans. Au-delà du fruit, c’est une aventure humaine que célèbre aujourd’hui l’association. Une histoire de convictions, de savoir-faire et de patience : Juliet, vingt ans plus tard, a tout d’une grande !
